Dans cet article, nous allons explorer Mathilde Delattre, un sujet qui a suscité à la fois intérêt et débat ces dernières années. Mathilde Delattre a fait l'objet d'études et de recherches dans diverses disciplines, et son impact sur la société et la culture est indéniable. Tout au long de l’histoire, Mathilde Delattre a joué un rôle crucial dans le développement de l’humanité et son influence continue d’être pertinente aujourd’hui. En ce sens, il est essentiel d’analyser de manière critique et objective le phénomène de Mathilde Delattre, ses implications et ses possibles répercussions dans notre monde contemporain.
Petite-fille d'Alexandre Casajeus dit Crillon[n 1], dessinateur puis photographe à Paris, Mathilde nait au Caire en 1871. Sa mère Clémentine y séjourne en effet à partir de 1868 auprès du khédiveIsmaïl Pacha, à l'occasion des fêtes d'inauguration du canal de Suez[2]. De retour à Paris, Clémentine épouse en mai 1874 à Paris[3] son cousin Paul Louis Delattre, originaire de Crespin (Nord) qui légitimera la fillette de trois ans[3], officiellement née de père inconnu. La famille habite 3 rue Pergolèse dans le 16e arrondissement ; son frère Georges nait en 1875 ; son père, employé de commerce, y décède en 1886[4],[2].
« Comme poussée par une vocation »[5], et après une seule année d'étude auprès de l'aquarelliste Madame Leroux, Mathilde Delattre est admise au Salon de 1889. C'est l'époque de la scission des salons, et les deux années suivantes elle accroche à la Société Nationale des Beaux-Arts[5], où ses envois sont remarqués[6]. L'école des Beaux-Arts étant toujours interdite aux femmes, elle complète alors sa formation auprès du peintre académique Henry-Eugène Delacroix, originaire de Valenciennes, qui ouvre en 1891 un atelier dans le 9e arrondissement de Paris. Elle est sans doute sensible à la poétique des paysages d'H.-E. Delacroix, mais également au style floral de Pauline Delacroix-Garnier qui enseigne avec son mari à partir de 1893[7]. Elle étudie dans le même temps auprès du peintre orientaliste Gaston Casimir Saint-Pierre, portraitiste réputé[8],[n 2].
Les « grandes floraisons », la reconnaissance et les élèves
Mathilde Delattre dans son atelier parisien, vers 1903[2].
Elle présente natures mortes, paysages et portraits, et s'adonne également à la gravure et à la céramique[n 4]. Mais c'est surtout à l'aquarelle, où elle se signale dans les grands formats, que sa sensibilité s'exprime le plus intensément. Son aquarelle Pour la procession est remarquée au Salon en 1902[12], où elle est récompensée d'une mention honorable, et d'une troisième médaille en 1905 pour son aquarelle Chez la fleuriste. Elle obtient le premier prix du Salon de l'Union des femmes peintres et sculpteurs en 1903 pour son aquarelle Dans un coin du parc, où la critique relève « une prestesse et une fraicheur qui achèvent de classer l’artiste au premier rang des peintres de fleurs »[13]. Elle est nommée Officier de l'Instruction publique le [14]. Tandis que ses grandes floraisons à l'aquarelle seraient influencées par les natures mortes complexes du XVIIe siècle, elle témoigne de son attachement au groupe de Marlotte, artistes du siècle précédent qui souhaitaient peindre sur le motif, en exposant en 1907 sa toile Le chemin des chardons. Souvenir de Marlotte[15]. En 1911, sa grande toile Veille de fête au cloître[n 5] est remarquée par Guillaume Apollinaire[16].
Mathilde Delattre, Veille de fête au cloître, huile sur toile 190 x 240 cm, 1911, carte Selecta. L'artiste a peint le cloître de l'abbaye d'Hautrages en Belgique.
Elle est associée à partir de 1900 à l'expérience des "XII", regroupement de femmes artistes françaises et étrangères qui exposent conjointement au théâtre de la Bodinière, initiative audacieuse pour l'époque. Elle est la plus jeune de ce collectif où elle va côtoyer Julia Beck et Maria Slavona[17],[18]. Elle ouvre son propre atelier et reçoit de nombreuses élèves au 17, rue Duperré à Paris (9e) de 1904 à 1940, et enseigne dans la même période au cours spécial d'aquarelle du 17e arrondissement de la ville de Paris[n 6]. Elle est sociétaire de la Société des artistes français en 1902 et membre du comité en 1912. Elle est sociétaire à la Société Nationale d'Horticulture de France (1902), membre en 1910 du comité[19] et du jury de l'Union des Femmes peintres et sculpteurs. Elle introduit ses élèves dans de nombreux salons et expositions ; au salon de 1914 de l'Union, on dénombre ainsi dix-huit de ses élèves parmi les exposantes.
Le parcours artistique après 1914 : vers le « plein air »
Représentation à l'aquarelle par Louise Leroy, élève et amie de Mathilde Delattre, de sa maison du "Hanneton" au Grand Andely.
Durant la première guerre mondiale, l'activité des Salons — et donc, en conséquence, l'enseignement dans les ateliers — chute drastiquement. Le village de Crespin (Nord) où Mathilde Delattre se ressourçait jusqu'alors étant en zone interdite, l'artiste retrouve alors souvent sa famille parisienne à Perros-Guirec[2], où elle réalise une série de petits « paysages bretons »[2]. Après 1918, elle réside et peint souvent aux Andelys (Eure) où elle acquiert une petite maison et entretient un jardin fleuri[2]: « ... de ma petite galerie en plein soleil tamisé par un rideau de fleurs, volubilis & grands pétunias de toutes couleurs, polygonum encore en neige & de brillants géraniums (...) je crois n'avoir jamais vu si doux & si bel automne (…) cela avec les phlox & les capucines & les feuillages rouges de la vigne vierge & celui des vignes qui ne le sont plus, c'est un véritable enchantement. » Elle en fera le sujet de nombreux « coins de jardins » ou autres « jardins dans une lumière transparente », thèmes sur lesquels elle multiplie alors les variations : Ses compositions — où elle a toujours le souci de créer un cadre, une « circonstance » aux fleurs, et qui dégagent, selon la critique, une atmosphère très subtilement poétique —[20],[21] vont évoluer vers un style de « plein air » (évoquant le luminisme belge), dans une poésie reconnue par la critique[22], qui la distingue de la plus grande exactitude des fleurs de ses grandes contemporaines aquarellistes telles Eugénie Faux-Froidure ou Blanche Odin[23]. « Mlle Delattre est une travailleuse, une chercheuse, qui ne s'est jamais cantonnée dans un genre (...) ; de plus en plus éprise de plein air, elle étudie la fleur dans son véritable milieu, sur pied, là où elle a tout son charme. Elle affectionne particulièrement l'heure chaude et atténuée du couchant, et que ses fleurs s'enlèvent sur des ciels dorés, sur des prairies ou sur des eaux glauques, elle sait en pénétrer toute la poésie et le pittoresque »[5]. À côté de ces recherches picturales sur le "plein air", elle produit toujours de très classiques aquarelles florales, qu'elle vend plus facilement.
Le marché de l'art s'est déplacé des salons vers les galeries, et Mathilde Delattre présente en 1927, tardivement mais avec succès, une première exposition particulière à la galerie Georges Petit à Paris, tout en exprimant une certaine réticence envers les prix excessifs des « marchands »[2]. En 1925 elle est réélue au Comité de l'Union. En 1927, elle remporte au Salon une médaille d'argent, mais aussi le prix Pillini, créé l'année précédente « pour récompenser des artistes peintres non favorisés par la fortune ». Femme célibataire, Mathilde Delattre vivra de son seul travail artistique jusque dans les années 1930[2]. Sa correspondance récemment découverte révèle sa constante énergie comme son indépendance[2]. Elle obtient au Salon une médaille d'or en 1930 avec son aquarelle Fin de jour, composition plus moderniste où « une lumière douce se joue parmi les fleurs, les porcelaines et les cristaux en désordre ».
Invitation à l'exposition particulière Mathilde Delattre, Galerie George Petit, Paris, février 1927.
Le décès en 1931 de sa mère, qui régentait l'activité de l'atelier[2], diminue sa production et inaugure une période de difficultés financières, aggravée par des accidents et des problèmes de santé. En 1937, elle est admise par le jury, à côté des artistes plus célèbres invitées, à l'exposition Les femmes artistes d'Europe exposent au Jeu de Paume, initiative de sociétés professionnelles de femmes artistes. En 1938, elle est élue membre du comité de la Société amicale des peintres et sculpteurs français[24], et elle est secrétaire-archiviste de la Société des aquarellistes. Son frère, qui habitait avec elle depuis 1925, décède en 1938. En 1942, tout-en gardant un petit logement parisien mansardé, elle doit se résigner, ne pouvant plus en honorer le loyer, à quitter son atelier de la rue Duperré à Paris (9e). Elle enseigne jusqu'en 1942 au moins à la mairie du 17e arrondissement, et expose une dernière fois en 1943 au Salon des artistes français, Contre-jour. Sa santé la contraint en 1949 à quitter son refuge de verdure du Grand Andely, et elle finit ses jours à la résidence pour dames de la fondation Greffulhe[n 7] à Levallois-Perret[26],[2].
Célibataire et sans fortune personnelle, Mathilde Delattre a vécu de sa profession d'artiste pendant plus de cinquante ans, enseignant et exposant dans de nombreux salons. Elle fait partie, avec Eugénie Faux-Froidure, Blanche Odin, Jeanne Lauvernay-Petitjean, etc. de ces artistes "fleuristes" reconnues de leur vivant, puis oubliées, de la fin du XIXe et de la première moitié du XXe siècle.
Principales expositions
À Paris
en 1889 puis de 1897 à 1943, au Salon de la Société des artistes français (mention honorable en 1902, médaille de bronze en 1905, médaille d'argent en 1927 et médaille d'or en 1930[27])
Exposition Universelle de Turin (1911, diplôme d'honneur)[39] ; Exposition internationale d'Horticulture de Saint Pétersbourg (1914, médaille d'argent)[31]
Œuvres principales
Toutes les œuvres actuellement connues de Mathilde Delattre sont présentées sur le projet de catalogue raisonné en ligne[2].
Semur-en-Auxois, musée municipal : Soleils, aquarelle, acquis par l'état en 1897, don à la Société des Sciences Historiques et Naturelles de Semur-en-Auxois en 1898, dépôt au musée en 2010[44].
Plusieurs de ces élèves sont redécouvertes au début du XXIe siècle, dans un mouvement de reconnaissance des femmes artistes[52] ; certaines comme Ysabel Minoggio, Louise Alix ou Yvonne Blanchon reprennent les thèmes floraux ou de plein air chers à Mathilde Delattre mais en les faisant évoluer dans un style « art moderne » ou « art déco ».
Postérité
En janvier 2023 est créée à l'initiative de sa famille l'association "Atelier Mathilde Delattre"[53], association à but non lucratif dont l'objectif est la promotion de la mémoire et de l’œuvre de l'artiste. Dans cette période de reconsidération des femmes peintres oubliées, ou dont les œuvres dorment au fond des collections des musées, l'association se mobilise pour une première exposition rétrospective (la seule exposition posthume connue incluant des œuvres de Mathilde Delattre est Histoire de la peinture lors des Journées du patrimoine 2022 à Crespin, au cours de laquelle sont accrochés les tout premiers portraits réalisés par l'artiste en 1894[54]).
↑Les catalogues mentionnent Mathilde Delattre comme élève de Ferdinand Humbert à partir de 1906[10].
↑Elle est également dite dessinateur et graveur[8].
↑Cette œuvre, représentant le cloître du couvent d'Hautrage, orne l'atelier de l'artiste jusqu'en 1938 où elle est vendue, puis, cédée par la famille de l'acquéreur vers 1950 aux environs de Monaco, n'est pas réapparue depuis sur le marché de l'art[2].
↑Sans doute exposée chez Georges Petit en 1925, mais l'artiste ne se résoudra à la vendre que face à ses ennuis financiers, cf. lettre du 27.3.40 : « hier j'ai vendu une aquarelle, bien inattendue aussi cela ! (…) une certaine orchidée, enrobée dans la fumée d'une cigarette (…) bien que j'y tenais à celle-là (…) sur fond noir & or, cadre de vieille glace, je l'avais faite, imprégnée de la lecture des « fleurs du mal » de Baudelaire »[2]
↑Œuvre vraisemblablement détruite lors du bombardement allemand et de l'incendie du musée le (source : Musée Nicolas-Poussin).
↑Marguerite Mathilde Anna Bernard (1878-1960) est également élève de Marthe Bougleux, Marie Latruffe-Colomb et Ferdinand Humbert. Elle expose à Versailles dès 1898, et au Salon de 1896 à 1905, mais ne semble plus produire après son mariage en 1906 avec l'architecte Jean Georges Albert Hébrard, Prix de Rome[8].
↑Marie-Hélène Bernard est ensuite également élève de Louise Alix. Elle expose au Salon de 1912 à 1936.
↑Paule Collas née Paula Primer dite Collas-Primer (1885-19..) est peut-être la même artiste que la lithographe Paule Collas présente au Salon entre 1913 et 1922[8].
↑Marie Émilie d'Heilly, née en 1867, épouse Joseph Defransure en secondes noces en 1898. C'est une des toutes premières élèves de Mathilde Delattre. Elle expose au Salon de 1899 à 1930. Elle est nommée Officier d'Académie en 1901. Professeur de dessin à Enghien, elle est présidente du 1er salon de peinture de cette ville en 1912.
↑Zoé Anne Marie Ernault (1885-1965) est la fille de l'homme de lettres et barde breton Émile Ernault dit Bars Ar Gouët, dont elle illustre les recueils. Elle épouse en 1885 le peintre André Laigneau. Elle expose des sculptures à la Société nationale des Beaux-Arts à partir de 1909, puis des aquarelles au Salon des artistes français
↑Elisabeth Girou de Buzareingues (1880-1928) expose au Salon à partir de 1899. Elle est professeur de dessin.
↑Germaine Gloria (1888-1962), peintre de fleurs, est connue comme affichiste à partir des années 1930. Elle a notamment travaillé avec Paul Colin au Salon d'Automne. Elle expose jusqu'en 1953. Les deux sœurs Gloria sont parfois dites Gloria-Colomb (patronyme de leur mère). Germaine reste célibataire tandis que Renée (1887-1959) épouse Marie Joseph Clément en 1915 et cesse d'exposer, obtenant en 1928 une médaille de la famille française pour ses six enfants.
↑Louise Holfeld (1882-1967) travaillera ensuite le cuir et sera dame de compagnie et héritière de la fille du sculpteur Jean-Baptiste Carpeaux[48].
↑Lucie Muller, née à Amiens, est d'abord élève des écoles professionnelles Elisa Lemonnier et expose de 1898 à 1912 au Salon en arts décoratifs (bois sculptés, lithographies). Elle est Sociétaire en 1907, comme graveur. À partir de 1909, elle expose des aquarelles florales au Salon et à l'UFPS, jusqu'en 1929 au moins. Elle obtient une médaille d'argent à Versailles en 1914. Elle devient Lucie Muller-Roux en 1925 et habite alors Nîmes.
↑Marie Pertué est, comme Mathilde Delattre, également élève de SaintPierre et Delacroix ; sociétaire des artistes français depuis 1897, elle expose au Salon de 1896 à 1906 (source : catalogues en ligne des Salons sur Gallica) et dictionnaire Bénézit
↑Marthe Roy (1880-1967) expose des miniatures dès 1898, puis des aquarelles de 1906 à 1929. Elle épouse vers 1911 le Dr René Kauffmann.
↑Marguerite Vallancienne est miniaturiste et aquarelliste, et expose de 1895 à 1913 aux Artistes français, à l'Union des femmes, etc., et en province. Elle est professeur de dessin à l'Orphelinat des Arts de Paris.
↑Jacqueline Vermandel (1910-1998) expose de 1930 à 1936. Elle épouse en 1933 l'avocat Raymond Cahen-Molinat.
Références
↑Franck Ferrand, La photo d'un inconnu nommé Rimbaud, portrait inédit du poète, en ligne sur Paris-Match, 2015.
↑ ab et cViolette Lame-Despres, Delattre (Mlle Mathilde) dans Les femmes d'aujourd'hui, 1912, pp. 342-4.
↑Lerat, La Revue des beaux-arts du 12 juillet 1890 sur Gallica.
↑Claudine Pardon, Henry-Eugène Delacroix Artiste-peintre 1845-1930, Solesmes, Association pour l'Etude et la Préservation du Patrimoine de Solesmes, , 324 p. (ISBN978-2-955-02313-6).
↑Éric Ledru, Une expérience collective de femmes artistes-peintres à l’orée du XXe siècle : les « XII » à la Bodinière sur ateliermathildedelattre, mars 2025.
↑L'information financière, économique et politique du 18 février 1928 sur Gallica.
↑Denise Noël, Les femmes peintres dans la seconde moitié du XIXe siècle, Open editions : « (Les femmes) restent également attachées à une façon de peindre traditionnelle, et leur méconnaissance des courants avant-gardistes leur a été souvent reprochée. C’est oublier que le paysage artistique de cette fin du XIXe siècle était beaucoup plus nuancé que nous l’imaginons. Certaines artistes, qui selon les critères actuels s’inscrivent dans la catégorie des « académiques », agissaient à ses frontières, notamment celles qui se préoccupaient de « plein air » et d’« effet de lumière ». ».
↑Bulletin de la Société amicale des peintres et sculpteurs français du 15 novembre 1938 sur Gallica.
↑Pierre Sanchez, préface de Ch. Beauvalot, Dictionnaire de l'Union des femmes peintres et sculpteurs : répertoire des artistes et liste de leurs œuvres : 1882-1965, Echelle de Jacob, Dijon.
↑ a et b« Hortalia », sur hortalia.org (consulté le ).