Salò ou les 120 Journées de Sodome

Salò ou les 120 Journées de Sodome Description de l'image Salò_o_le_120_giornate_di_Sodoma_movie_black_logo.png. Données clés
Titre original Salò o le 120 giornate di Sodoma
Réalisation Pier Paolo Pasolini
Scénario Pier Paolo Pasolini,
sur une idée de Sergio Citti
Musique Ennio Morricone
Acteurs principaux

Paolo Bonacelli
Giorgio Cataldi
Umberto Paolo Quintavalle
Aldo Valletti

Pays de production Drapeau de l'Italie Italie
Genre Drame
Durée 117 minutes
Sortie 1975

Série 'Trilogie de la mort'

Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution.

Salò ou les 120 Journées de Sodome (Salò o le centoventi giornate di Sodoma) est un film italien réalisé par Pier Paolo Pasolini en 1975. Prévu comme le premier épisode de sa Trilogie de la mort, il s'agit du dernier film du cinéaste, assassiné moins de deux mois avant sa sortie en salle à Rome. Il n'a d'ailleurs pas eu le temps d'en finir le montage, d'où une dernière partie écourtée (à la suite d'une disparition ou d'un vol de bobines).

C'est une libre adaptation, transposée au XXe siècle, de l’œuvre du marquis de Sade (1740-1814), Les Cent Vingt Journées de Sodome, dont l’action se passait, elle, à la fin du règne de Louis XIV (mort en 1715).

Synopsis

(Cette section contient sûrement des spoilers)

L'action commence à Salò, ville près du lac de Garde où, en septembre 1943, les nazis installèrent Benito Mussolini, qu'ils venaient de libérer. Quatre notables riches et d'âge mûr, fascistes et libertins, y rédigent leur projet macabre. Elle se poursuit par la capture de 9 jeunes garçons et 9 jeunes filles dans la campagne et quelques villages alentour.

Les quatre notables, le Duc, l’Évêque, le Juge et le Président, entourés de divers servants armés et de quatre prostituées, ainsi que de leurs femmes respectives (chacun ayant épousé la fille d'un autre au début du film), s'isolent dans un palais des environs de Marzabotto, dans la république de Salò.

Divisé en quatre sections, comme dans l'œuvre du marquis de Sade, qui prennent le nom de cercles infernaux, comme dans l'œuvre de Dante Alighieri, le film met en scène les adolescents (garçons et filles) choisis par ces notables devant endurer cent vingt jours de manipulation, maltraitance, torture, domination sexuelle et mentale.

L'ensemble du film est crûment montré dans une mise en scène qui reprend le cérémonial sadien.

Fiche technique

Distribution

L'actrice incarnant la première victime parmi les neuf filles (qui implore madame Castelli de l'aider à s'échapper au début du film, qui tente de se défenestrer durant le premier récit de madame Vaccari et qui finit égorgée dans l'autel religieux) n'est pas créditée au générique ; son prénom n'est pas mentionné au cours du film.

Musiques

Icône signalant une information Sauf indication contraire ou complémentaire, les informations mentionnées dans cette section peuvent être confirmées par la base de données IMDb. Aucun crédit ne figure au générique.

Doublage et langues du film

Les actrices françaises Hélène Surgère et Sonia Saviange ont été choisies par Pier Paolo Pasolini parce qu'il les avait remarquées dans le film Femmes femmes (1974) de Paul Vecchiali : ces deux actrices reprennent (toujours en français) le sketch « Femmes femmes » dans Salò ou les 120 journées de Sodome, sketch qu’elles interprétaient déjà dans le film homonyme. Hormis ce sketch, le rôle de Sonia Saviange est muet.

La version originale parlant italien et sous-titrée en français (VOSTF) est la seule qui soit sortie sur grand écran en France. Conformément aux habitudes de production italiennes, certains rôles sont doublés dans cette version originale parlant italien. Une version « officielle » parlant français et due à Jean-Claude Biette a été éditée par la suite en DVD. Biette a précisé dans le générique de cette version « officielle » :

« Je me souviens du moment où j’ai terminé le sous-titrage de Salò, Pasolini est passé au studio d’enregistrement dans le 13e, on lui avait préparé des essais de voix pour tous les rôles. C’était pour lui un film français, à cause de Sade, mais aussi des citations de Proust, Klossowski, Sollers, Blanchot. Il tenait à ce que la version originale soit la version française. »

Dans la quatrième partie, on entend à la radio une œuvre d’Ezra Pound (1885-1972), poète américain qui trahit son pays au profit de Mussolini.

Commentaire

Le film est inspiré de l'œuvre du marquis de Sade (1740-1814) Les Cent Vingt Journées de Sodome et des événements qui se sont déroulés dans la ville de Salò, au nord de l'Italie, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, lorsque Mussolini y est installé par les nazis et y fonde une république fasciste fantoche, la République sociale italienne.

C'est le film le plus sombre et le plus désespéré de Pasolini. Il est minutieusement construit comme une descente progressive à travers différents cercles de la perversité, à l'image de l'œuvre de Sade. Selon Jean-Luc Douin, dans Le Monde, après avoir réalisé une série de films exaltant la sexualité dans l’allégresse (Trilogie de la vie), Pasolini considère la libération sexuelle comme une tromperie. Il s’élève contre la société de consommation et le capitalisme, qui asservissent la sexualité, qui devrait être libératrice, et expose les vies privées. Il dénonce dans son film, une nouvelle fois, les horreurs de la société bourgeoise : la sexualité, auparavant vue comme une grâce pour l’humanité, devient une marchandise à consommer, sans égard pour la dignité humaine. Les dernières scènes, particulièrement difficiles à soutenir, sont vues à travers des jumelles, afin d’installer une distance.

Accueil

Le film fait scandale lors de sa sortie. Il est interdit ou censuré dans de nombreux pays pendant plusieurs années, y compris en Italie. En février 2007, sa projection est interdite à Zurich, en Suisse, à la suite de plaintes (la polémique éclate après que le journal gratuit 20 Minuten a stigmatisé la programmation de Salò dans une église de Zurich dans le cadre d'une rétrospective consacrée au cinéaste italien ; le film devait être projeté dans le temple protestant en raison des travaux de rénovation du cinéma Xenix). Finalement, quelques jours plus tard, la censure est levée sous la pression des défenseurs de la liberté d'expression.

Aujourd'hui encore, près de 50 ans après sa sortie, le film est considéré comme l'un des plus scandaleux et violents jamais réalisés. La sévérité de ses images et le réalisme cru avec lequel elles sont montrées contribuent au mythe du film et beaucoup le considèrent comme un véritable classique du cinéma mondial.

À la télévision

Toujours interdit de diffusion à la télévision publique française, hormis une diffusion sur FR3 à la fin des années 1970, Salò fait l'objet d'un véritable culte ; il a longtemps été projeté dans une salle « Art et Essai » du Quartier latin de Paris.

Réservé à un public averti, il a toutefois été diffusé en France sur CinéCinéma Classic à l'occasion d’une intégrale Pasolini fin 2008 et sur Paris Première.

Par des cinéastes

Encore aujourd’hui, des réalisateurs comme Gaspar Noé et Claire Denis avouent, dans un supplément du DVD paru en 2009, leur malaise au visionnage du film.

Il est resté un sommet pour de nombreux cinéastes, dont R.W. Fassbinder, qui, pourtant, avait vu la projection en France de son film Maman Küsters s'en va au ciel perturbée le 22 novembre 1975 lors du festival de Paris, la foule envahissant la salle de cinéma avant l'heure pour être sûre d'avoir une place pour Salò, le film suivant.

Michael Haneke le considère comme l'un de ses films préférés même si, selon ses dires, il n'a jamais pu le revisionner.

Récompenses

Le film fut récompensé du prix Venezia Classici du meilleur film restauré à la Mostra de Venise 2015.

Incohérences

Notes et références

  1. Source : SensCritique. Voir, plus particulièrement, les commentaires qui font suite à la critique.
  2. Figure au générique de début. Source : IMDB.
  3. (it) « Salò o le 120 giornate di Sodoma », sur cinematografo.it (consulté le 21 juillet 2021).
  4. « Salò ou les 120 journées de Sodome », sur Régie du cinéma.
  5. Le « duc de Blangis » du roman.
  6. L’évêque, frère du duc.
  7. Le « président de Curval » du roman.
  8. Le financier « Durcet » du roman.
  9. Par exemple, dans le film La Nuit américaine (film français réalisé par François Truffaut, sorti en 1973), un réalisateur français est aux prises avec une actrice italienne incapable ou peu s’en faut de dire le moindre texte.
  10. Jean-Luc Douin, « L’Enfer selon Pasolini », Le Monde, 9 mai 2009, présentation du DVD.
  11. Voir sur tsr.ch.
  12. Au Cinéma de minuit dans le cadre d’un cycle Pasolini.
  13. « L'intégrale Pasolini sur CineCinema Classic », Le Monde.fr,‎ 11 octobre 2008 (lire en ligne, consulté le 20 mai 2022).
  14. « Film indigeste, que l'on a du mal à digérer ».
  15. « J'ai eu un malaise, je suis allée aux toilettes… je me suis sentie éjectée hors du film. »
  16. Le site IMDb (consulté le 20 mars 2009) indique que la première eût lieu le 7 juillet 1975 en Allemagne de l'Ouest.
  17. Michel Cieutat et Philippe Rouyer, Haneke par Haneke, Stock, 2012, chap. 1, p. 30-32.
  18. (ne) Sur le site nardloonen.nl.
  19. Voir sur bordeaux7.com.

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes