Le patrimoine mondial ou patrimoine mondial de l'UNESCO est un ensemble de biens culturels et naturels présentant un intérêt exceptionnel pour l'héritage commun de l'humanité. Ce patrimoine fait l'objet d'un traité international intitulé « Convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel », adopté par l’UNESCO en 1972, actualisé chaque année depuis 1978 par le Comité du patrimoine mondial de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), une institution spécialisée de l'Organisation des Nations unies.
En 2023, 1 157 biens sont inscrits au patrimoine mondial dont 900 biens culturels, 218 naturels et 39 mixtes. En comptant les sites répartis sur plusieurs pays, l'Italie est celui qui en possède le plus grand nombre (58), suivie par la Chine (56), l'Allemagne (51), l'Espagne et la France (49). Cordoue en Espagne est la ville qui compte le plus grand nombre de sites inscrits au patrimoine mondial de l'UNESCO, avec quatre inscriptions. Seuls quatre biens ont été retirés de la liste depuis sa création, ainsi qu'une partie de l'ancien site géorgien « cathédrale de Bagrati et monastère de Ghélati », le périmètre classé ne comprenant désormais plus que le monastère. Le comité du patrimoine mondial est instauré par la Convention concernant la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel, texte adopté le 16 novembre 1972 lors de la XVIIe conférence générale de l’Unesco, et ratifié en novembre 2016 par 192 de ses 195 États membres. Le but de cette liste est de cataloguer, nommer, et conserver (grâce au fonds du patrimoine mondial) des biens culturels, naturels ou « mixtes » d’importance pour l’héritage commun de l’humanité. Les sites inscrits au patrimoine mondial font généralement l'objet d'une exploitation touristique mettant en avant cette reconnaissance.
L’Unesco s’efforce de respecter un équilibre entre continents dans la localisation du patrimoine mondial. À l’origine, l’Europe était surreprésentée. C'est encore le cas, mais l’apparition des sites naturels exceptionnels contribue à une harmonisation géographique.
En 2023, avant la 45e session du Comité du patrimoine mondial, 1 157 biens sont répertoriés, répartis en 167 États parties : 900 sont culturels, 218 naturels, et 39 mixtes (culturels et naturels). Ces biens sont aussi répertoriés suivant cinq régions selon une définition propre à l'Unesco qui ne se fonde pas que sur des critères géographiques:
Liste des quinze États parties à la Convention de 1972 possédant les plus grands nombres de sites en 2023:
Rang | États parties | Nombre de sites |
---|---|---|
1 | Italie | 59 |
2 | Chine | 57 |
3 | Allemagne | 52 |
France | 52 | |
5 | Espagne | 50 |
6 | Inde | 42 |
7 | Mexique | 35 |
8 | Royaume-Uni | 33 |
9 | Russie | 31 |
10 | Iran | 27 |
11 | Japon | 25 |
États-Unis | 25 | |
13 | Brésil | 23 |
14 | Canada | 22 |
15 | Turquie | 21 |
« Le patrimoine est l'héritage du passé dont nous profitons aujourd'hui et que nous transmettons aux générations à venir. Nos patrimoines culturel et naturel sont deux sources irremplaçables de vie et d'inspiration. »
— Extrait de la convention de 1972.
L'objectif principal de la liste du patrimoine mondial est de faire connaître et de protéger les sites que l’organisation considère comme exceptionnels. Pour ce faire, et dans un souci d’objectivité, ont été mis en place des critères. À l'origine, seuls existaient les sites culturels (1978), dont l'inscription sur la liste était régie par six critères. Puis, à la suite notamment d'un souci de rééquilibrer la localisation du patrimoine mondial entre les continents, sont apparus les sites naturels et quatre nouveaux critères. Enfin, en 2005, tous les critères ont été fondus en 10 critères uniques applicables à tous les sites. Ce sont les suivants :
La conservation, la gestion et la transmission aux générations futures des biens inscrits sur la liste du patrimoine mondial incombent en premier chef à l’État partie signataire de la convention, mais l’inscription sur la liste postule que ces biens appartiennent aussi à l’« Humanité » et sont ainsi placés sous une sorte de sauvegarde internationale. Il y a donc un système de coopération et d’assistance pour aider l’État partie, notamment d'un point de vue financier et matériel. La communauté n’entre pas directement dans la gestion des biens concernés, mais il y a un suivi qui est réalisé par des organismes internationaux indépendants de l’État partie (exemple : centre mondial de surveillance continue de la conservation de la nature). Cette protection est toute relative par rapport à la souveraineté de l’État partie sur son territoire.
Selon Olivier Lazzarotti, professeur des Universités à l'UFR d'histoire et de géographie de l'Université d'Amiens, sa création a permis aux Etats-Unis de "compenser, dans l’ordre des Sept Merveilles du Monde, la déficience en matière de monuments anciens", en valorisant la place prise par les parcs de Yellowstone et du Yosemite "dans la construction du pays" tandis que persiste un "relatif « vide » de l’Afrique", entrainant l’invention du « patrimoine immatériel » en octobre 2003 et montrant que "le tourisme a une place essentielle dans ce mouvement de patrimonialisation". Selon ce chercheur, ce « patrimoine immatériel » montre que le tourisme, "loin de « détruire » la culture", devient ainsi ce "qui la fait vivre, si ce n’est revivre".
L'inscription sur la liste indicative nationale de l'État partie porteur de la candidature (en anglais : Tentative list) constitue le préalable incontournable à une demande de reconnaissance mondiale par le Comité du patrimoine mondial. Le Centre du patrimoine mondial, qui s'assure de l'éligibilité des candidatures, vérifie en effet que la proposition de bien a fait l'objet d'une première évaluation nationale qui a justifié son inscription sur la liste indicative de l'État partie concerné. Cette évaluation nationale consiste en l'analyse de la valeur universelle exceptionnelle potentielle du bien proposé, qui se fait à partir des critères définis par les Orientations devant guider la mise en œuvre de la Convention du patrimoine mondial, dans sa dernière version. En France, cette analyse est réalisée par les services de l’État (ministère chargé de la culture et ministère chargé de l'écologie).
Chaque pays signataire de la Convention dresse donc une liste indicative nationale qui figure sur le site du patrimoine mondial de l'humanité.
Cette liste regroupe les sites pour lesquels l'État partie a l'intention de déposer un dossier de candidature à l'Unesco.
L'inscription d'un site sur la liste indicative se fait au moyen d'un formulaire spécifique appelé « format pour la soumission d'une liste indicative ».
La préparation du dossier de candidature est une opération complexe qui peut prendre plusieurs années. La présentation du dossier est encadrée par les Orientations devant guider la mise en œuvre de la Convention du patrimoine mondial. Tout dossier doit comporter la justification de la valeur universelle exceptionnelle du bien proposé, sa description et la démonstration de son authenticité et de son intégrité, un plan de gestion détaillé ayant pour objectif de préserver sa valeur universelle exceptionnelle. Une cartographie très précise du bien et, le cas échéant, de sa zone tampon doit être produite à l'appui du dossier de candidature.
La proposition d'inscription, qui doit être signée, est déposée par l’État partie au Centre du patrimoine mondial de l'Unesco qui a son siège à Paris. Le dossier doit être rédigé en français ou en anglais. La candidature doit être déposée au plus tard au 31 janvier de l'année précédant la session du Comité du patrimoine mondial au cours de laquelle elle sera examinée. Il s'écoule en effet un délai de 18 mois entre le dépôt du dossier et la décision finale prise par le Comité.
En France, le dépôt de la candidature se fait après avis du Conseil national des biens français inscrits au patrimoine mondial. Cette instance a été créée en 2004 à l'initiative des ministères chargés respectivement de la culture et de l'écologie, responsables du suivi de la Convention. Ce comité réunit des experts de différentes disciplines en présence de l'ambassadeur, délégué de la France auprès de l'Unesco. Ce comité a pour rôle de conseiller (avis consultatif) les deux ministres dans la sélection des candidatures et de manière plus générale, dans la mise en œuvre de la Convention sur le territoire national.
En 1994, le Comité du patrimoine mondial lance la Stratégie globale pour une Liste du patrimoine mondial « équilibrée, représentative et crédible » pour assurer une représentation plus équilibrée à l'échelle mondiale. La procédure de candidature longue, coûteuse et complexe, favorise en effet les grands pays développés qui mobilisent leurs hauts fonctionnaires impliqués dans les ministères de référence, leurs chargés de mission des dossiers de candidature qui ont une bonne maîtrise des critères d'éligibilité, leurs experts du patrimoine, leurs diplomates et les soutiens institutionnels et associatifs à différentes échelles (État, collectivités locales). L'adoption de quotas (dépôt d'un dossier de candidature tous les deux ans pour chaque pays, limites sur les nominations annuelles) ne parvient cependant pas à combler le déséquilibre de la Liste relatif aux pays et catégories de biens sous-représentés.
Le dossier fait l'objet d'un premier examen formel par le Centre du patrimoine mondial qui s'assure de sa complétude et de sa conformité au format Unesco. Au 1er mars de l'année 1, le secrétaire général du Centre du patrimoine mondial informe l’État partie de cette complétude puis transmet le dossier aux organes consultatifs de la Convention : l'ICOMOS pour les biens culturels, l'UICN pour les biens naturels, ou les deux pour les biens mixtes. Pour le cas particulier des paysages culturels, l'ICOMOS consulte l'UICN. Ces experts sont en effet chargés d'assurer l'évaluation scientifique et technique de la candidature et d'établir un rapport pour l'information du Comité du patrimoine mondial, assorti d'une proposition de décision. Ils disposent d'un an pour mener à bien cette évaluation et une mission d'expertise a en principe lieu sur site entre août et décembre de l'année 1.
Six semaines avant la session du Comité du patrimoine mondial, le rapport d'expertise est adressé à l’État partie. Cette disposition permet à l’État partie de retirer la candidature avant la session du Comité, si d’aventure les conclusions des experts étaient défavorables et lui ouvre ainsi la possibilité de présenter à nouveau un dossier réorienté qui sera reçu comme une proposition nouvelle.
« Le Comité du patrimoine mondial décide si un bien doit être inscrit ou non sur la Liste du patrimoine mondial, ou si son examen doit être différé, ou son dossier renvoyé ».
S'il décide l'inscription, le Comité adopte alors une déclaration de valeur universelle exceptionnelle du bien, qu'il peut assortir de recommandations. S'il rejette l'inscription, la décision est alors définitive et le bien ne peut être de nouveau présenté. S'il renvoie le dossier, il demande alors des informations complémentaires qui doivent lui être soumises avant le 1er février de l'année durant laquelle l’État partie souhaite que la candidature soit examinée. Le Comité peut enfin différer l'examen de la proposition pour faire procéder à une évaluation plus approfondie ou demander une révision substantielle du dossier à l’État partie.
Le Comité du patrimoine mondial étudie les rapports sur l’état de conservation des biens naturels et culturels inscrits sur la liste du patrimoine mondial en péril. Il établit, met à jour et diffuse, chaque fois que les circonstances l'exigent, sous le nom de « liste du patrimoine mondial en péril », une liste des biens figurant sur la liste du patrimoine mondial pour la sauvegarde desquels de grands travaux sont nécessaires et pour lesquels une assistance a été demandée aux termes de la convention. Cette liste contient une estimation du coût des opérations. Ne peuvent figurer sur cette liste que des biens du patrimoine culturel et naturel qui sont menacés de dangers graves et précis, tels que menace de disparition due à une dégradation accélérée, projets de grands travaux publics ou privés, rapide développement urbain et touristique, destruction due à des changements d'utilisation ou de propriété de la terre, altérations profondes dues à une cause inconnue, abandon pour des raisons quelconques, conflit armé venant ou menaçant d'éclater, calamités et cataclysmes, grands incendies, séismes, glissements de terrain, éruptions volcaniques, modification du niveau des eaux, inondations, raz-de-marée.
Selon un recensement mené par l'UNESCO et l'UICN, les sites du patrimoine mondial abritent plus de 25 % de la biodiversité mondiale, comprenant entre autres, plus de 75 000 espèces de plantes et plus de 20 000 espèces de vertébrés.
En dehors de la convention du 16 novembre 1972 concernant le patrimoine mondial culturel et naturel, il existe d'autres conventions et programmes de l'Unesco liés au patrimoine.
Depuis 1992, le programme Mémoire du monde vise à sensibiliser la communauté internationale à la richesse du patrimoine documentaire, à la nécessité d’assurer sa conservation pour les générations futures et à le rendre accessible à un large public.
En 1997, le concept de patrimoine oral et immatériel de l'humanité a été défini. Une proclamation des chefs-d’œuvre culturels immatériels, dont la première a eu lieu en 2001, établit une liste qui vient compléter celle du patrimoine matériel mais dont la « Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel » de 2003 et le « Comité intergouvernemental de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel » sont différents de ceux du « patrimoine mondial ».
En 2001 a été adoptée la convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique pour lutter contre le pillage, la destruction et l'exploitation commerciale de ce patrimoine spécifique.
The World Heritage Volunteer (WHV), créé par l’Unesco, cherche à surmonter les frontières et les territoires pour rassembler de jeunes bénévoles du monde autour d'un projet de protection du patrimoine mondial. Le World Heritage Volunteer sensibilise les jeunes au patrimoine mondial via des projets de volontariat afin qu’ils soient en mesure d'en prendre soin et qu’ils puissent transmettre cet héritage. C’est pourquoi le Comité de Coordination du Service Volontaire International (CCSVI) et le Centre du patrimoine mondial ont lancé conjointement ce projet en 2008. En 2012, WHV propose des projets de volontariat dans plus de 25 pays sur tous les continents. Le projet comprend 33 associations de jeunesse et quelque 700 bénévoles venant de part et d’autre du globe afin de partager leur culture, préserver les sites naturels, restaurer les découvertes archéologiques et sensibiliser les communautés locales. Les partenaires agissent sur divers sites du patrimoine mondial : de l’antique Chan Chan zone archéologique au Pérou aux sites naturels tels que l’énorme chute Victoria en Zambie, les projets proposés sont aussi nombreux que diversifiés. Le WHV espère, de cette façon, favoriser la paix et les échanges entre les cultures et sensibiliser les jeunes sur l’importance de préserver le patrimoine mondial. Derrière ces projets, différentes associations, notamment Vive Mexico, Nataté, SJ Vietnam ou encore le Service Volontaire International qui entretiennent les partenariats nécessaires en vue de permettre aux jeunes dans leurs pays de se préparer pour participer ensuite à ces multiples chantiers à l'étranger.
Il existe une littérature critique des politiques de l'UNESCO et du rôle des États dans les classements. L'inscription de sites du patrimoine mondial peut avoir des effets (en) sur leurs communautés locales soumises aux processus de surfréquentation touristique qui provoquent des nuisances sociales (trafics, bruit, incivisme) et environnementales. Facteur de touristification ou pire de disneylandisation, la labellisation peut avoir aussi d'autres conséquences négatives en lien avec la surexploitation des richesses de ces sites : effets de banalisation liés à une « mise en marque » généralisée de ces territoires ou au contraire de folklorisation du patrimoine et des cultures locales présentées comme traditionnelles pour répondre aux besoins des touristes et de marchandisation (le journaliste Marco d'Eramo parle à ce sujet d'UNESCO-cide) ; muséification ou transformation du site en « musée à ciel ouvert » alors que les populations locales ne désirent pas continuer à vivre dans des mondes révolus ; dépossession et gentrification commerciale et résidentielle des lieux visités, en rupture avec l'idéal de mixité sociale et culturelle que poursuit l'UNESCO ; tertiarisation des activités au détriment de l'économie locale traditionnelle,.
L'augmentation des sites labellisés fait naître entre eux des rivalités d'ordre économique (financement de leur préservation et de leur mise en valeur) et géopolitique.