Léon Ier (pape)

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Léon Ier
Image illustrative de l’article Léon Ier (pape)
Saint Léon le Grand,
Francisco Herrera el Mozo (XVIIe siècle),
musée du Prado. Madrid.
Biographie
Nom de naissance Leo
Naissance Entre 390 et 400
en Tuscie
Décès 10 novembre 461
Rome
Pape de l'Église catholique
Élection au pontificat 29 septembre 440
Fin du pontificat 10 novembre 461
(en) Notice sur www.catholic-hierarchy.org

Léon Ier le Grand (en latin Leo Magnus) est pape de 440 à 461. Il est connu pour son intervention dans les controverses christologiques du Ve siècle : sa position doctrinale exprimée dans le Tome à Flavien est adoptée comme la doctrine orthodoxe au concile de Chalcédoine en 451. Face au délitement du pouvoir impérial, il négocie en 452 avec Attila la retraite des hordes hunniques et en 455 avec Genséric la survie de Rome. Il est considéré comme saint et Docteur de l'Église par l'Église catholique romaine qui le célèbre le 10 novembre.

Origines

Ses origines sont mal connues. Né en Toscane ou à Rome entre 390 et 400, fils d'un dénommé Quintianus, il est archidiacre de Rome sous le pontificat de Célestin Ier (422/432) puis de Sixte III (432/440) dont il est l'homme de confiance. À la mort de ce dernier, le 19 août 440, Léon est en Gaule à la demande de la cour de Ravenne afin d'arbitrer un conflit entre le patrice Aetius et Albinus le préfet du prétoire des Gaules.

Élection

Sa réputation et son influence sont si grandes qu'il est élu pape par le peuple romain pendant son absence en Gaule. Il rentre à Rome en septembre pour être sacré le 29 de ce mois. Il a pour conseiller Pierre Chrysologue.

Sa personnalité

Léon Ier ne fit que peu de confidences sur sa personne, contrairement à nombre de ses successeurs. De son pontificat, on ne connaît que son activité pastorale et théologique. Il ignore probablement le grec, ne goûte guère la philosophie et les auteurs classiques dont on ne trouve quasiment pas de citations dans la centaine de sermons que l'on possède de lui. Mais Léon Ier possède au plus haut point la conscience de la dignité de sa fonction d'évêque de Rome dont il justifie la primauté par sa qualité de successeur de Pierre.

De fait, il privilégie de façon claire la fonction plutôt que la personne qui l'assume. Ce principe ne sera plus réellement remis en question avant 1054. D'ailleurs, en 445, l'empereur Valentinien III reconnaît officiellement la primauté du pape à la suite de la condamnation de l'évêque d'Arles Hilaire. Il est énergique et serein, tenace et résolu.

Ses positions

Sa juridiction

Le Concile de Chalcédoine, par Vassili Sourikov, 1876.

Il exerce sa juridiction sur trois zones. Tout d'abord la ville de Rome et l'Italie où il réprime la secte des manichéens et le pélagianisme. En 443, il rassemble à Rome de nombreux évêques et prêtres pour mettre en garde contre les sectes et inviter ceux qui le souhaitent à se rétracter de leurs erreurs. Beaucoup, semble-t-il, se rétractent ; quant aux récalcitrants ils sont sanctionnés. Léon oblige aussi les évêques à assister chaque année au synode de Rome. Il leur rappelle les conditions d'admission à l'épiscopat. Sur la Gaule, l'Espagne et l'Afrique du Nord ensuite où il encourage la lutte contre le priscillianisme, invitant l'évêque d'Astorga à réunir un concile contre cette hérésie. De même il exprime sa réprobation à Hilaire d'Arles qui s'arroge un pouvoir sur les évêques de Gaule.

En Orient, enfin, il exerce sa juridiction sur l'Illyricum (les régions balkaniques) par l'intermédiaire de l'évêque de Thessalonique, dont il a fait son vicaire. Surtout, il intervient de façon décisive dans les troubles qui agitent l'Orient à la suite de l'enseignement d'Eutychès, qui ne veut voir dans le Christ qu'une seule nature, la divine (monophysisme). Il adresse à Flavien de Constantinople une lettre (le « Tome », Ep., XXVIII) qui expose avec netteté et fermeté le dogme des deux natures dans l'unique personne du Christ. Après l'échec du concile convoqué par Théodose II (le « brigandage » d'Éphèse, 449), Léon, d'accord avec le nouvel empereur Marcien, sut imposer ce dogme au concile de Chalcédoine.

Sa pensée théologique

Christologie

Les innombrables querelles sur la personne et la nature du Christ permettent à Léon Ier d'en imposer aux théologiens byzantins. Dans le Tome à Flavien, lettre publiée le 13 juin 449 et adressée au patriarche de Constantinople, il exprime de façon magistrale la doctrine de l'unicité de la personne du Christ subsistant en deux natures distinctes et réfute ainsi clairement le monophysisme. Théodose II convoque un concile à Éphèse en 449 mais Eutychès empêche les représentants du pape de prendre la parole (le brigandage d'Éphèse). Le triomphe d'Eutychès est de courte durée car, après la mort accidentelle de Théodose II, la nouvelle impératrice Pulchérie et son mari Marcien, favorables à l'orthodoxie, convoquent un nouveau concile à Chalcédoine (451). Léon Ier fait triompher son point de vue et, à la lecture de son Tome à Flavien, l'assemblée se lève, s'écriant : « C'est Pierre qui parle par la bouche de Léon ». Si le triomphe doctrinal est complet, il en va différemment sur le plan politique où Léon Ier accuse un échec avec le 28e canon du concile qui affirme l'égalité de droit des sièges de Rome et de Constantinople, les deux villes étant cités impériales. Pour Léon, c'est inacceptable car sa primauté, estime-t-il, vient non pas du prestige de la ville mais de sa qualité de successeur de Pierre. Cette tension, source de bien des conflits dans l'avenir, reste pour l'instant contenue car Léon Ier est conscient de l'importance pour la papauté d'être présente à Constantinople.

Liturgie Articles détaillés : Liturgie et Eucharistie.

La foi permet à celui qui entend la lecture de l'Évangile d'être présent spirituellement à l'événement. Il est commémoré, mais l'action du Christ est rendue présente et agissante (sous la forme du pain et du vin). La célébration des mystères est une source de joie, en même temps qu'un moyen pour affermir la foi des fidèles.

Morale Articles connexes : Péché et Théologie morale catholique.

Chaque sermon part de la contemplation du Mystère célébré, et aboutit à une parénèse, une exhortation. Le Christ est sacramentum et exemplum: il procure la grâce par la vertu de son action, et témoigne du chemin à suivre.

Son action politique

Léon Ier et Attila, peinture de Raphaël (peintre).

L'action politique de Léon Ier n'est pas négligeable. L'épisode le plus célèbre est la rencontre avec Attila en 452 à Mantoue où le pape persuade le conquérant de faire demi-tour. Il est vrai que l'intervention de l'empereur Marcien sur les arrières des Huns n'est sans doute pas étrangère au retrait d'Attila, plus sans doute que le pouvoir de persuasion du pape. En 455, il lui est impossible d'empêcher le deuxième pillage de Rome par Genséric et ses Vandales. Mais il parvient quand même à négocier que la ville ne soit pas incendiée et qu'il n'y ait ni meurtres, ni viols, ni violences.

Héritage

Saint Léon meurt le 10 novembre 461. Il est enseveli sous le portique de la basilique vaticane. Il est, avec Grégoire Ier et Nicolas Ier (non officiel), le seul pape auquel a été attribué le qualificatif de « grand ». Il est fêté le 10 novembre, dans le rite romain post-conciliaire, le 11 avril dans le rite romain pré-conciliaire et 18 février selon le calendrier oriental julien (3 mars dans le calendrier grégorien, 2 mars les années bissextiles).

Nous possédons de lui 173 lettres qui sont autant de documents sur la vie de l'Église et de la papauté. Il est aussi le premier pape dont nous ayons les Sermons, 97 en tout, prononcés généralement lors des grandes fêtes de l'année liturgique, ou des temps privilégiés. On en lit des extraits dans la liturgie des heures (office des lectures ou matines), par exemple à Noël, ou (selon le rite dominicain) les trois jours du Triduum pascal.

Ces lettre sont d'une grande simplicité, clairs, souvent assez courts, ils exposent les mystères du Christ, préconisent le jeûne et la générosité et prêchent le dogme de l'Incarnation tel qu'il est défini au concile de Chalcédoine. Certains expliquent aussi sa conception du rôle du souverain pontife lequel est l'héritier de l'autorité conférée par Jésus à Pierre. Ce dernier, selon Léon Ier, est toujours présent dans l'Église et transmet à son successeur son autorité suprême. C'est pourquoi seul le siège apostolique, le siège de l'Apôtre, c'est-à-dire Rome, doit recevoir la mission de diriger l'Église universelle (catholique). Il considère qu'à la grandeur passée de la cité impériale doit succéder l'humilité de la Rome des apôtres Pierre et Paul.

Saint Léon a permis le premier missel qui, modifié, est dévenu le Sacramentaire léonien, compilation de textes liturgiques des Ve, VIe et VIIe siècles. Le Sacramentaire léonien contient probablement des éléments qui remontent à saint Léon.

Il est proclamé “Docteur de l'Église“ (Doctor unitatis Ecclesiae) en 1754 par son lointain successeur Benoît XIV.

Léon est le sujet d'une tragédie de Juliana Cornelia de Lannoy, intitulée Léon le Grand (1767). Louis de Wohl, dans Le trône du monde (1946), réédité sous le titre Attila le Hun, fait intervenir Aetius, Attila, Honoria et Léon Ier dans ce roman historique.

Écrits

Article connexe : Fra Angelico Dissemblance et Figuration.

Léon le Grand, pape et docteur de l'Église, a largement contribué à formuler contre les hérésies la doctrine chrétienne de l'Incarnation.

Faire nous-mêmes ce qu'il fait

« Bien-aimés, si nous comprenons à la lumière de la foi et de la sagesse les débuts de notre création, nous découvrions que l'homme a été fait à l'image de Dieu (cf. Gn 1, 27) pour imiter son auteur et que notre dignité naturelle consiste en ce que la ressemblance de la bonté divine brille en nous comme un miroir. Cette ressemblance, la grâce du Sauveur la restaure tous les jours en nous, car ce qui est tombé dans le premier Adam est relevé dans le second.

Or le motif de notre restauration n'est autre que la miséricorde de Dieu ; nous ne l'aimerions pas s'il ne nous avait aimés le premier (cf. Jn 4, 19) et n'avait, par la lumière de sa vérité, dissipé les ténèbres de notre ignorance. C'est pourquoi, en nous aimant, Dieu nous restaure à son image et, afin de trouver en nous la ressemblance de sa bonté, il nous donne le moyen de faire nous-mêmes ce qu'il fait ; il allume, en effet, le flambeau de nos intelligences et nous enflamme du feu de son amour, pour que nous l'aimions, et non seulement lui, mais aussi tout ce qu'il aime. »

— Léon le Grand. 1er Sermon sur le jeûne du 10e mois, 1, trad. R. Dolle, Paris, Cerf, coll. « Sources Chrétiennes » 200, 1973, p. 151-153.

Évite le mal, fais ce qui est bien

« Aux occupations du monde, soustrayons-nous, et dérobons un peu de temps qui nous serve à acquérir les biens éternels. Tous, en effet, comme il est écrit, nous commettons des écarts, et souvent (Jc 3, 2). Sans doute les dons que Dieu nous fait tous les jours nous purifient de bien des souillures ; cependant des tâches assez grossières demeurent le plus souvent imprimées sur les âmes négligentes, tâches qu'il faudrait laver au prix d'un soin plus attentif et effacer à plus grands frais. Or, on obtient la remise la plus totale des péchés lorsque la prière de l'Église entière est une.

C'est, aux regards du Seigneur, une chose grande et fort précieuse, bien-aimés, que le peuple entier du Christ s'applique ensemble aux mêmes devoirs et que les chrétiens de l'un et l'autre sexe, à tous les degrés et dans tous les ordres, collaborent dans un même sentiment : qu'une seule et même détermination les anime tous à éviter le mal et à faire ce qui est bien.

Rien n'est demandé à personne qui soit pénible, rien qui soit difficile et rien ne nous est imposé qui excède nos forces, qu'il s'agisse de se mortifier par l'abstinence ou de se montrer généreux dans l'aumône. Chacun sait ce qu'il peut et ce qu'il ne peut pas. À chacun d'estimer sa propre mesure. »

— Sermon 75, 3-5, trad. R. Dolle, Paris, Cerf, coll. « Sources Chrétiennes » 200, 1973, p. 95-97.

Paroles de Léon Ier dit le Grand

Sermones (italien). - Imprimé à Florence: Antonio Miscomini, le XXI mai MCCCCLXXXV. - 174 c. Biblioteca europea di informazione e cultura. Extrait et sermons, Le Seigneur est livré à ceux qui Le haïssent. Pour insulter Sa dignité royale, on L'oblige à porter Lui-même l'instrument de Son supplice. Ainsi s'accomplissait l'oracle du prophète Isaïe : Il a reçu sur ses épaules le pouvoir. En se chargeant ainsi du bois de la Croix, de ce bois qu'il allait transformer en sceptre de Sa force, c'était certes aux yeux des impies un grand sujet de dérision mais, pour les fidèles, un Mystère étonnant : Le Vainqueur glorieux du démon, l'Adversaire tout-Puissant des puissances du mal, présentait sur Ses épaules, avec une patience invincible, le Trophée de Sa victoire, le Signe du salut, à l'adoration de tous les peuples.

Bibliographie

Éditions

Études

Bande dessinée

Notes et références

  1. Nulle part on ne voit de personnalité païenne défendre efficacement la société romaine contre les Barbares. Partout cette défense est assurée par les évêques qui seront ainsi les derniers représentants authentiques de la romanité, le pape saint Léon à Rome." (Jean Dumont, L'Église au risque de l'histoire, préface de Pierre Chaunu de l'Institut, Editions de Paris, Ulis 2002, p. 47-52.).
  2. Saint Léon le Grand et la cité romaine. Persée (portail).
  3. Les évêques de Thessalonique. Persée (portail).
  4. Saint Léon le Grand, pape, docteur de l'Église († 461), héraut de la Romanitas.
  5. voir en lien externe
  6. Nous possédons la lettre de Théodoret de Cyr à Léon de Rome où il en appelle au verdict romain contre la condamnation qu’il a encourue à Ephèse sans avoir été entendu. Théodoret de Cyr, Correspondance, lettre 113, Éditions du Cerf, Paris.
  7. Comment grandir dans la foi ?.
  8. « Sacramentum et exemplum » chez saint Augustin - Sermons de St Léon.
  9. Voir saint Léon le Grand sur Nominis
  10. Omer Englebert, La fleur des saints, Paris, Albin Michel, 1998, 469 p. (ISBN 978-2-226-09542-8), p. 367.
  11. (la) Breviarium Romanum, Pars Verna. Editio nova typica, Typis Polyglottis Vaticanis, 1949, p. 832
  12. (en-US) maryadmin, « Feb. 18 Our Father among the Saints Leo, Pope of Rome », sur St. Mary Byzantine Catholic Church, 18 février 2023 (consulté le 11 avril 2024)
  13. (la) Breviarium Romanum, Pars Hiemalis, Ratisbonae, Pustet, 1950, Editio XX iuxta typicam éd., p. 297
  14. (la) Liturgia Horarum iuxta ritum Romanum: Editio typica altera: I: Tempus Adventus, tempus Nativitatis, Libreria Editrice Vaticana, 1985, p. 349
  15. (la) Breviarium iuxta ritum Ordinis Praedicatorum, pars prior, Romae ad s. Sabinae, 1962, p. 360, 381, 404
  16. Il lutte contre les hérésies : manichéisme en Italie (notamment à Rome), pélagianisme, nestorianisme, monophysisme ou eutychianisme , priscillianisme en Espagne.
  17. « L'éternité de l'essence divine absolue est contredite par l'incarnation du Christ, mais c'est seulement dans un troisième moment qu'elles sont réconciliées dans le Savoir absolu sous la forme du concept. La chute de l'esprit dans le temps est alors corrigée ; l'éternité est rétablie ; elle n'est plus abstraite, mais vivante. »; Jean-Louis Vieillard-Baron, Les paradoxes de l’éternité chez Hegel et chez Bergson, in Les études philosophiques no 59, éd. Puf, 2001/4, article en ligne
  18. Léon Ier dit le Grand, pape.
  19. « Sermon pour la Passion » de Saint Léon le Grand.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes