Cet article fournit diverses informations et statistiques sur l'abstention lors d'élections en France.
En France, le vote n'est pas obligatoire au sens juridique : « voter est un droit, c'est aussi un devoir civique » est inscrit sur les cartes électorales. Il n'est obligatoire qu'aux élections sénatoriales pour les grands électeurs (députés et conseillers municipaux, départementaux et régionaux) qui se voient, en cas d’abstention, infliger une amende de 100 euros depuis une loi votée en 2004.
Le taux d'abstention peut être calculé de différentes manières. En France, le ratio est établi en rapportant le nombre des citoyens s'étant abstenus (autrement dit, les personnes ne s'étant pas déplacées) lors d'un vote au nombre de ceux inscrits sur les listes électorales, à la date du scrutin. Les personnes n'étant pas inscrites sur les listes électorales ne sont donc pas comptées dans les abstentions. Les votes blancs et nuls ne sont pas non plus comptabilisés dans les chiffres de l'abstention.
Dans une étude parue début 2015, le chercheur en sciences politiques Vincent Pons affirme que : « Nous avons souvent tendance à surestimer les motifs politiques de l’abstention, alors que la composante sociologique est également très forte ». Alors que la participation est homogène en 2012, la participation oscille au niveau national entre 64 % et 94 % (soit une amplitude de 30 %), en 2014, le spectre s'élargit entre 34 % et 82 % (soit 48 % d'amplitude) en prenant appui sur l'élection présidentielle de 2012 et européennes de 2014. S'appuyant sur le cas non spécifique de Perpignan et du département des Pyrénées-Orientales, il observe que l'amplitude est d'autant plus importante que la participation globale est faible, notamment dans les zones urbaines. Ainsi le différentiel passe de 4 points en 2012 à 9 points en 2014 pour les Pyrénées-Orientales. Dans le cas de la ville de Perpignan, il observe qu'en 2014 le reflux frappe particulièrement les zones où le parti vainqueur de la présidentielle de 2012 s'était imposé.
« L'inscription sur les listes électorales est obligatoire » en vertu de l’article L9 du code électoral, mais aucune sanction n'est prévue. Depuis 1997, la loi prévoit l’inscription d’office sur la liste électorale de la commune du domicile des personnes qui remplissent les conditions d’âge requises. Cela concerne les jeunes dans l’année suivant leur majorité électorale.
Selon plusieurs études de l'Insee, en y ajoutant les personnes qui ignorent qu'elles sont inscrites sur les listes électorales, environ 4,9 millions de Français ne sont pas inscrits ou croient ne pas l'être (données 2004), chiffre qui varie entre 10 % et 13,3 % du corps électoral sur les neuf dernières années.
En 2007, on estimait que le corps électoral comprenait 44,5 millions d'électeurs pour 62 millions d'habitants.
En 2016, on estimait que le corps électoral comprenait 44,834 millions d'électeurs pour 66 millions d'habitants.
En 2018, on estimait que le corps électoral comprenait 45,448 millions d'électeurs pour 67 millions d'habitants.
Au 14 avril 2019, le corps électoral comprenait 47,148 millions d'électeurs pour 67 millions d'habitants
Céline Braconnier et Jean-Yves Dormagen ont étudié sur une longue durée la cité des Cosmonautes à Saint-Denis, dans la banlieue nord de Paris,,.
En France, l'abstention serait influencée par un sentiment de non-représentation politique, sur quatre points :
Le niveau de la catégorie socio-professionnelle affecterait l’abstentionnisme en France : les CSP « basses » s'abstiennent plus alors que les CSP niveau d’études élevé s'impliquent davantage.
Alors que le second tour des élections législatives de 2017 établit un nouveau record d'abstention pour ce type de scrutin, Céline Braconnier estime qu'elle a été favorisée par le profil jusqu'alors peu clivant du président de la République Emmanuel Macron : « Beaucoup nous disent s’attendre à "en prendre plein la tête". Mais Emmanuel Macron n’est pas assez clivant pour les mobiliser contre lui. Ces abstentionnistes sont dans une indifférence teintée d’appréhension mais pas dans l’opposition ». L'abstention est particulièrement forte chez les moins de 30 ans : « Les jeunes ne vont plus voter quand ils ne comprennent pas pourquoi on leur demande de se rendre aux urnes. Les personnes âgées, elles, y vont encore par devoir et n’arrivent pas à entraîner leurs enfants. Pour la présidentielle , on a vu voter des familles. Là, seulement les parents ». En 2023, Jean Massiet, streamer de vulgarisation politique sur la plateforme Twitch, estime sur France Bleu que « les jeunes adorent la politique , en revanche boudent les formes traditionnelles de la politique, c’est-à-dire le bon vieux bulletin de vote, les cartes d’adhésion à un parti ou à un syndicat ».
Les chercheurs en sciences politiques Céline Braconnier et Jean-Yves Dormagen remarquent lors de la présidentielle de 2017 que les deux bureaux test qu'ils étudient au long cours, l'un dans le quartier parisien du Marais l'autre dans le quartier des Cosmonautes à Saint-Denis que la participation atteignait 85,3 % dans le premier et seulement 65,2 % à Saint-Denis. Ils notent qu'un retraité, diplômé du supérieur, âgé entre 65 et 70 ans, avait ainsi une probabilité de 98 % d’avoir voté au premier tour de la présidentielle de 2012, quand une ouvrière non diplômée, ayant entre 18 et 24 ans, présentait une probabilité de 33 % de s’être abstenue. La jeunesse, l'absence d’études, ainsi que le fait d'appartenir aux classes populaires sont autant de facteurs qui favorisent l’abstention. Si le bureau étudié à Saint-Denis a placé Jean-Luc Mélenchon en tête avec 48,5 % des voix et celui de Paris Emmanuel Macron avec 46,1 % des suffrages, les chercheurs remarquent que le différentiel de participation profite au candidat d'En marche !.
Date | Abstention |
---|---|
12 juin 1979 | 39,29 % |
17 juin 1984 | 43,28 % |
10 juin 1989 | 51,2 % |
12 juin 1994 | 47,24 % |
13 juin 1999 | 53,24 % |
13 juin 2004 | 57,24 % |
7 juin 2009 | 59,37 % |
25 mai 2014 | 57,57 % |
26 mai 2019 | 49,88 % |
Année | Date | Abstention |
---|---|---|
1965 | 5 décembre (premier tour) | 15,2 % |
19 décembre (second tour) | 15,7 % | |
1969 | 1er juin (premier tour) | 22,4 % |
15 juin (second tour) | 31,1 % | |
1974 | 5 mai (premier tour) | 15,8 % |
19 mai (second tour) | 12,7 % | |
1981 | 24 avril (premier tour) | 18,9 % |
10 mai (second tour) | 14,1 % | |
1988 | 24 avril (premier tour) | 18,6 % |
8 mai (second tour) | 15,9 % | |
1995 | 23 avril (premier tour) | 21,6 % |
7 mai (second tour) | 20,3 % | |
2002 | 21 avril (premier tour) | 28,4 % |
5 mai (second tour) | 20,29 % | |
2007 | 22 avril (premier tour) | 16,23 % |
6 mai (second tour) | 16,03 % | |
2012 | 22 avril (premier tour) | 20,52 % |
6 mai (second tour) | 19,65 % | |
2017 | 23 avril (premier tour) | 22,23 % |
7 mai (second tour) | 25,44 % | |
2022 | 10 avril (premier tour) | 26,31 % |
24 avril (second tour) | 28,01 % |
Année | Date | Abstention |
---|---|---|
1958 | 23 novembre (premier tour) | 22,8 % |
30 novembre (second tour) | 25,2 % | |
1962 | 18 novembre (premier tour) | 31,3 % |
25 novembre (second tour) | 27,9 % | |
1967 | 5 mars (premier tour) | 18,9 % |
12 mars (second tour) | 20,3 % | |
1968 | 23 juin (premier tour) | 20 % |
30 juin (second tour) | 22,2 % | |
1973 | 4 mars (premier tour) | 18,7 % |
11 mars (second tour) | 18,2 % | |
1978 | 12 mars (premier tour) | 16,8 % |
19 mars (second tour) | 15,1 % | |
1981 | 14 juin (premier tour) | 29,1 % |
21 juin (second tour) | 24,9 % | |
1986 | 16 mars | 21,5 % |
Pas de second tour : scrutin à la proportionnelle | ||
1988 | 5 juin (premier tour) | 34,3 % |
12 juin (second tour) | 30,1 % | |
1993 | 21 mars (premier tour) | 30,8 % |
28 mars (second tour) | 32,4 % | |
1997 | 25 mai (premier tour) | 32 % |
1er juin (second tour) | 28,9 % | |
2002 | 9 juin (premier tour) | 35,6 % |
16 juin (second tour) | 39,7 % | |
2007 | 10 juin (premier tour) | 39,6 % |
17 juin (second tour) | 40,0 % | |
2012 | 10 juin (premier tour) | 42,78 % |
17 juin (second tour) | 44,59 % | |
2017 | 11 juin (premier tour) | 51,3 % |
18 juin (second tour) | 57,36 % | |
2022 | 12 juin (premier tour) | 52,49 % |
19 juin (second tour) | 53,77 % |
Lors du second tour des législatives de 2017, aucun électeur du village drômois de Pennes-le-Sec n'a émis de bulletin de vote.
Date | Sujet | Abstention |
---|---|---|
28 septembre 1958 | Référendum constitutionnel : Constitution du 4 octobre 1958 (Cinquième République) | 19,4 % |
8 janvier 1961 | Autodétermination de l'Algérie | 26,3 % |
8 avril 1962 | Accords d'Évian | 24,7 % |
28 octobre 1962 | Élection au suffrage universel du président de la République | 23 % |
27 avril 1969 | Référendum constitutionnel : création des régions et réforme du Sénat | 19,9 % |
23 avril 1972 | Élargissement des Communautés européennes | 39,8 % |
3 novembre 1988 | Autodétermination de la Nouvelle-Calédonie | 63,1 % |
20 septembre 1992 | Traité de Maastricht | 30,3 % |
24 septembre 2000 | Référendum constitutionnel : quinquennat | 69,8 % |
29 mai 2005 | Constitution de l'Union européenne (TCE) | 30,6 % |
Année | Date | Abstention |
---|---|---|
1986 | 16 mars (tour unique) | 21,73 % |
1992 | 22 mars (tour unique) | 31,37 % |
1998 | 15 mars (tour unique) | 41,97 % |
2004 | 21 mars (premier tour) | 39,16 % |
28 mars (second tour) | 34,34 % | |
2010 | 14 mars (premier tour) | 53,67 % |
21 mars (second tour) | 48,79 % | |
2015 | 6 décembre (premier tour) | 50,09 % |
13 décembre (second tour) | 41,59 % | |
2021 | 20 juin (premier tour) | 66,72 % |
27 juin (second tour) | 65,31 % |
Année | Date | Abstention |
---|---|---|
2001 | 11 mars (premier tour) | 34,52 % |
18 mars (second tour) | 43,75 % | |
2004 | 21 mars (premier tour) | 36,09 % |
28 mars (second tour) | 33,52 % | |
2008 | 9 mars (premier tour) | 35,11 % |
16 mars (second tour) | 44,55 % | |
2011 | 20 mars (premier tour) | 55,68 % |
27 mars (second tour) | 55,23 % | |
2015 | 22 mars (premier tour) | 49,83 % |
29 mars (second tour) | 50,02 % | |
2021 | 20 juin (premier tour) | 66,68 % |
27 juin (second tour) | 65,64 % |
Date | Sujet | Abstention |
---|---|---|
6 juillet 2003 | Référendum de 2003 en Corse : fusion des deux conseils généraux de Haute-Corse et de Corse-du-Sud au sein d’une collectivité territoriale unique | 39,17 % |
7 décembre 2003 | Consultations sur les modifications de statut territorial en Outre-mer : création à Saint-Martin d'une collectivité d'outre-mer | 55,82 % |
7 décembre 2003 | Consultations sur les modifications de statut territorial en Outre-mer : création à Saint-Barthélemy d'une collectivité d'outre-mer | 21,29 % |
7 décembre 2003 | Consultations sur les modifications de statut territorial en Outre-mer : création en Guadeloupe d'une collectivité territoriale unique | 49,66 % |
7 décembre 2003 | Consultations sur les modifications de statut territorial en Outre-mer : création en Martinique d'une collectivité territoriale unique | 56,06 % |
10 janvier 2010 | Référendum guyanais (1er référendum) : plus large autonomie à la région | 51,84 % |
10 janvier 2010 | Référendum martiniquais (1er référendum) : plus large autonomie à la région | 44,65 % |
24 janvier 2010 | Référendum guyanais (2e référendum) : fusion du département unique et de la région en une seule collectivité territoriale | 72,58 % |
24 janvier 2010 | Référendum martiniquais (2e référendum) : fusion du département unique et de la région en une seule collectivité territoriale | 64,19 % |
7 avril 2013 | Référendum sur la Collectivité territoriale d'Alsace | 64,04 % |
Année | Date | Abstention |
---|---|---|
1959 | Premier tour | 25,2 % |
Second tour | 26,1 % | |
1965 | Premier tour | 21,8 % |
Second tour | 29,2 % | |
1971 | Premier tour | 24,8 % |
Second tour | 26,4 % | |
1977 | Premier tour | 21,1 % |
Second tour | 22,4 % | |
1983 | Premier tour | 21,6 % |
Second tour | 20,3 % | |
1989 | Premier tour | 27,2 % |
Second tour | 26,9 % | |
1995 | Premier tour | 30,6 % |
Second tour | 30 % | |
2001 | Premier tour | 32,6 % |
Second tour | 31 % | |
2008 | Premier tour | 33,46 % |
Second tour | 34,8 % | |
2014 | Premier tour | 36,45 % |
Second tour | 37,87 % | |
2020 | Premier tour | 55,25 % |
Second tour | 58,6 % |
En 2017, l'abstention lors de la présidentielle s'est élevée à 22,23 % le 23 avril (premier tour) et à 25,44 % le 7 mai (second tour) soit plus d'un électeur français sur quatre.
Les électeurs ont pu voter lors de 4 scrutins : deux pour l’élection présidentielle et deux pour les élections législatives. L’INSEE a analysé les abstentions lors de ceux-ci : 14 % des électeurs se sont abstenus à tous les tours de scrutin et 86 % ont voté à au moins un des quatre tours ; 35 % ont voté à tous les tours des élections et 51 % ont voté par intermittence. Deux inscrits sur dix n’ont voté qu’aux deux tours de la présidentielle. Les élections législatives mobilisent beaucoup moins que la présidentielle : 85 % des inscrits ont voté au moins une fois à la présidentielle contre 58 % aux législatives. Les inscrits qui s’abstiennent systématiquement aux élections de 2017 sont plus souvent jeunes (moins de 30 ans) ou âgés (80 ans ou plus), ils sont aussi plus souvent sans diplôme, ils ont un niveau de vie plus faible et sont plus souvent inactifs ou ouvriers que les autres inscrits.